Théorie polyvagale et psychologie énergétique

 
(Publication : 06 juillet 2020)

La théorie polyvagale de Stephen Porges, encore fort peu connue en France, est en train de révolutionner le monde de la psychothérapie, notamment au niveau du traitement des traumatismes. Elle nous aide à comprendre l’interaction entre les branches sympathique et le parasympathique du système nerveux, non seulement dans la création et l’entretien de la douleur, mais dans virtuellement tous les symptômes de corps-esprit de problèmes de santé qu’on puisse imaginer. Elle couvre tout, des problèmes émotionnels aux problèmes spirituels. Tout est compris et peut être expliqué dans une certaine mesure par cette théorie. Cet article est extrait d’un entretien entre Maggie Philipps, une proche collaboratrice de Porges et Robert Schwarz, directeur éxécutif de l’ACEP (Association américaine de la Psychologie Énergétique Intégrative), dans le cadre d’une formation complète en ligne sur la science des soins énergétiques, traduite en français.

Stephen Porges a identifié trois circuits dans le système polyvagal. Le tout premier, le système vagal ventral d’engagement social nous aide à comprendre comment l’attachement et l’engagement fonctionnent dans le système nerveux. Avant lui, nous pensions avoir un système sympathique et un système parasympathique ; maintenant, nous savons que nous avons trois systèmes nerveux, trois branches.

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Le système vagal ventral 

Le système vagal ventral de l’engagement social, qui est en action lorsque nous sommes au repos, ou du moins quand nous ne sommes pas menacés, nous aide à nous engager avec l’environnement, les autres et nous-mêmes. Il nous aide aussi à réguler le système sympathique-surrénal et nous maintient dans une fenêtre de tolérance, ce qui est très important quand on travaille sur le traumatisme. Lorsque nous sommes menacés, pourtant, le système vagal ventral est outrepassé par le système sympathique (Porges appelle cela le sympathique-surrénal) qui mobilise les réactions de survie de combat et de fuite. L’amygdale déclenche le signal d’alarme et l’hypothalamus déclenche une cascade de substances qui comprennent le cortisol, l’épinéphrine, l’adrénaline et d’autres, pour mobiliser notre énergie contre la menace.

L’activation du système sympathique a donc pour résultat un flux accru de sang vers les muscles du corps, leur donnant plus d’énergie pour combattre ou fuir. Le flux vers le cortex cérébral est alors diminué, nous ne pensons donc pas aussi bien, comme une partie du cerveau est éteinte. Cela augmente notre vigilance. Toutes ces réactions optimisent nos chances de survie.

 

Le système vagal dorsal

Souvent, pourtant, le système vagal ventral de l’engagement et la réaction combat/fuite ne sont pas proportionnels à la menace. Dans ce cas, le système vagal dorsal s’active automatiquement. C’est le système le plus primitif et il est déclenché par un manque d’oxygène dans les tissus et les muscles. Autrement dit, quand on est à cours de carburant pour le mouvement, pour se défendre ou fuir, alors ça pousse le cerveau à se mettre en position d’immobilité.

On voit cela dans le monde animal quand les mammifères simulent la mort. L’exemple type est celui de s’immobiliser comme un opossum. La réaction d’immobilité qui se déclenche lorsque le système vagal dorsal bloque de nombreuses fonctions corporelles mène à une réduction du rythme cardiaque et de la respiration et s’accompagne d’engourdissement. Bien que cette immobilité protège notre survie, si elle est active pendant une longue période, elle peut être absolument fatale, les gens peuvent en mourir (menant à des problèmes cardiaques et respiratoires, parmi bien d’autres troubles).

Le nerf du système vagal a deux branches principales qui se rejoignent là où la branche cardiaque est connectée. Le cœur est très important en termes de science polyvagale, et c’est aussi là que la psychologie énergétique rejoint la science polyvagale. Quasiment tous les systèmes d’organes dans le corps sont affectés par le nerf vagal, appelé aussi nerf vague, qui le plus long nerf du corps. Il démarre au dixième nerf crânien et se faufile à travers la moelle épinière et la colonne vertébrale, puis il se connecte à tous ces différents systèmes d’organes : les poumons, le cœur, l’estomac, la rate, le foie, le côlon, le rein, l’intestin grêle, etc.

Porges considère le système nerveux autonome du point de vue de la sécurité, un sujet important quand on travaille avec les traumatismes. Quand on est en lieu sûr, on a une activation optimale, on est au repos et on digère, on est connecté au système vagal ventral – le système d’engagement – et on remarque et participe au contact visuel, à l’expression faciale, la vocalisation et d’autres comportements sociaux. Lorsque le danger apparaît, on commence à passer en mode hyperactivation. Notre rythme cardiaque s’accélère, le système sympathique, le système surrénal s’enclenchent, on mobilise l’énergie de la réponse combattre/fuir et survivre. On peut aussi subir la rage et la panique dissociées.

Lorsqu’on passe au niveau de menace sur la vie (quand notre organisme perçoit que l’on va mourir), on change. Au lieu d’une hyperactivation, nous sommes en hypoactivation. On descend dans la branche vagale dorsale du système parasympathique, et on a un rythme cardiaque très faible. Avec certaines personnes, le cœur s’arrête pendant ce changement. On passe en immobilité au lieu de la mobilité, c’est le blocage. On subit un effondrement dissocié.

 

La psychologie énergétique et la théorie polyvagale

Quand on visualise le système polyvagal en regardant du haut vers le bas de l’organisme, on voit une échelle de fibres nerveuses qui va du cerveau au cœur. Il n’y a pas que le flux sanguin, mais une énergie électromagnétique qui est très importante pour comprendre la psychologie énergétique.

Porges suggère que lorsqu’on se sent en sécurité avec les autres, nous pouvons alors communiquer avec d’autres personnes. C’est là que nous pouvons établir le contact visuel, sourire, écouter et que nous avons ce qu’il appelle la prosodie, un certain rythme et intonation qui est très plaisant et un ton plus aigu que grave dans la voix. La première étape d’une relation ou de l’engagement est d’aider l’autre personne à se sentir en sécurité. Il faut bien sûr qu’on s’aide soi-même à se sentir en sécurité. La sûreté est vraiment fondamentale et elle provient du système vagal ventral.

Le système nerveux parasympathique sur le nerf vagal est différent dans les états de danger et de menace : on distingue le parasympathique de rétablissement et le parasympathique immobilisé, dissocié. Lorsque nous sentons le danger, l’ancien système vagal (dorsal) augmente son activité. Quand nous subissons un défi, nous essayons d’abord de parler, de négocier si c’est possible; puis nous passons en combat/fuite, puis nous nous bloquons. La seule exception à ceci est dans les situations où le vagal ventral est complètement dépassé.

Cela peut arriver pour diverses raisons, comme par exemple avec les patients douloureux qui épuisent les gens qui les aident à se prendre en charge. Comme les gens se retirent ou les jugent, ils ont appris à ne pas communiquer. Ils vont encore plus alors dans cet état de blocage. Souvent aussi quand on est en mode combat, si on ne peut pas répondre à la menace, on va automatiquement passer en blocage vagal dorsal.

La psychologie énergétique s’articule avec le système polyvagal de plusieurs manières intéressantes qui ont des implications sur les soins pour nous tous. La psychologie énergétique regroupe une famille d’approches intégratives du soin qui s’organise sur trois éléments majeurs du système énergétique : le champ bioénergétique autour du corps, les chakras en tant que centres d’énergie et le système des méridiens sous forme de trajectoires énergétiques qui parcourent tout le corps avec des acupoints qui peuvent être stimulés pour créer diverses réactions.

Par exemple, certaines personnes travaillent sur les points tranquillisants et d’autres sur les points énergisants. Pour faire le lien avec le système polyvagal, si vous avez un client très activé, vous chercherez à en savoir plus sur les points tranquillisants comme le montre le travail de Donna Eden sur la médecine énergétique (elle sera également présente au Congrès de Lyon les 18 et 19 mars). Ensuite, bien sûr, vous trouvez les points qui sont les plus stimulants pour le gens qui sont déprimés, plus fermés, plus bloqués.

La psychologie énergétique rejoint également le système polyvagal au niveau du cœur. Le cœur a son propre système nerveux que nous pouvons considérer comme une sorte de cerveau. Ce que nous savons d’après les recherches de l’institut HeartMath, c’est que le champ énergétique du cœur est plus puissant que le champ énergétique du cerveau (environ 100 000 fois plus puissant que le champ électrique du cerveau et jusqu’à 5 000 fois plus puissant que le champ magnétique du cerveau).

Les chercheurs de HeartMath ont aussi démontré que le cerveau du cœur existe. Autrement dit, le cœur a son propre système nerveux, que nous pouvons considérer comme une sorte de cerveau. Il s’avère que le cœur initie davantage de messages vers le cerveau que ne le fait le cerveau vers le cœur. Ce que cela signifie, c’est que c’est notre engagement avec nous-même et avec les autres d’une manière aimante et sécurisante, qui nous donne envie que ces signaux soient envoyés vers le cerveau. Nous voulons que cela informe notre pensée, nos projets et nos décisions dans la vie, et maintenant nous savons que l’anatomie appuie cette idée.

 

L’importance de la variabilité cardiaque

Le système nerveux autonome est très important parce qu’il régule tout automatiquement, et on a besoin de savoir comment l’organisme fait cela. Il y a plusieurs façons de le savoir, mais un moyen s’appelle la variabilité cardiaque. Elle est mesurée dans l’intervalle entre les battements de cœur. Le système nerveux autonome joue un rôle immense dans la variabilité cardiaque. Si une personne est déprimée, ou a une faible variabilité, cela veut dire que son cœur bat de manière trop régulière. Cela traduit une aptitude réduite du système nerveux autonome à tout réguler pour pouvoir rester en bonne santé : l’homéostasie, la capacité à gérer des facteurs agressifs internes et externes, les menaces, etc. Chaque jour, nous subissons des menaces d’une nature ou l’autre (des menaces relationnelles, des menaces de notre propre corps, parce que nous avons une maladie, une pathologie auto-immune ou ce que vous voulez). La variabilité cardiaque mesure la capacité à réguler et récupérer face aux facteurs agressifs internes et externes.

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En plus de mesurer le fonctionnement régulateur du système nerveux autonome, la variabilité cardiaque est aussi un indice des réactions émotionnelles régulées. On cherche la cohérence et en psychologie énergétique, on parle beaucoup de cohérence. Lorsque les gens utilisent des méthodes de soins énergétiques, que ce soit la Psychologie Énergétique ou la Médecine Énergétique, ce qui nous intéresse vraiment, c’est cette idée de cohérence – les états intégratifs, cognitifs et émotionnels où on se sent calme et centré. C’est une cohérence de tous ces différents systèmes. Quand on se trouve dans cette position où les systèmes sont synchronisés entre eux et qu’il y a une harmonie entre tous ces processus : la pensée, l’émotionnel, le physiologique, etc. alors nous avons la santé. Vous êtes centré, dans une position où vous pouvez penser plus clairement.

De simples outils comme la respiration cardiaque (où vous imaginez ressentir que vous inspirez dans le cœur et expirez par le cœur) aident les gens à créer le calme et l’équilibre intérieur. La recherche a pu mesurer toutes sortes de résultats formidables avec cette pratique. L’augmentation de la variabilité cardiaque en fait partie, ce qui veut dire une grande flexibilité, ainsi que l’espoir, l’estime de soi, l’auto-efficacité et certainement la santé mentale, émotionnelle et physiologique. C’est donc une approche très importante.

 

Roger Callahan et la variabilité de la fréquence cardiaque

Roger Callahan, qui a développé la thérapie du champ mental (TFT – le précurseur de l’EFT), a réalisé un grand nombre d’expériences où il a montré que la variabilité cardiaque était améliorée après le traitement de TFT. Le problème central avec ça, et avec leurs recherches, c’est que nous manquons d’essais contrôlés randomisés. « Ce que je dirais, c’est qu’on sait déjà en psychologie énergétique qu’on a besoin d’améliorer nos recherches, la randomisation, les études contrôlées, etc. ; donc ce n’est pas nouveau. Mais je pense qu’on ne peut pas ignorer certaines des données de Callahan », explique Maggie Philipps. L’un de ses rapports porte sur 20 cas de personnes avec des diagnostics de problèmes cardiaques (soit une variabilité cardiaque très faible, des rythmes cardiaques très rigides ; et ce n’est pas bon pour la santé, ni le reste). Après une brève intervention avec la TFT, qui consiste à stimuler une séquence prescrite de points méridiens, il a trouvé une amélioration énorme, soit de fortes augmentations de la variabilité cardiaque.

Nous avons aujourd’hui besoin de plus d’études contrôlées randomisées qui relient les résultats à la variabilité de la fréquence cardiaque. Le comité de recherche à l’ACEP est activement impliqué dans ce domaine et qu’il y a de plus en plus de bonnes études qui sortent. Il faut aussi qu’on enseigne plus largement la variabilité de la fréquence cardiaque afin de fournir des protocoles et développer des instruments qui soient simples et abordables, et puis bien sûr relier cela à la recherche qui en prouve réellement l’efficacité.

La VFC est une mesure de la santé du système polyvagal. Une des raisons pour laquelle la psychologie énergétique est si efficace est qu’on travaille sur ce système vagal non-verbal. Stephen Porges fut le premier à quantifier et à utiliser la VFC dans des recherches psychophysiologiques. Ce qui a vraiment intrigué Porges, c’est ce qu’on appelle le « paradoxe polyvagal ». Il y a ces mécanismes qui servent d’intermédiaire à certains aspects de notre réponse au stress, etc., mais pouvons-nous expliquer comment ils servent d’intermédiaire à l’arythmie sinusale respiratoire, qui est une mesure protectrice, et à la bradycardie, qui est fatale ? La production vagale d’une branche vers le cœur est liée au système vagal myélinisé, qui favorise le calme, la relaxation et inhibe l’activation de la réponse combattre ou fuir et de l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien (HHS). L’autre branche, ou l’autre type de système vagal, soit le nerf vague non-myélinisé, qui est connecté à la fois au circuit sympathique-surrénal et au circuit vagal dorsal, est manifeste dans la bradycardie ; c’est la réaction cardiaque fatale. Les deux réunis forment en fait la respiration cardiaque.

Porges travaille maintenant à développer des manières d’identifier et de mesurer les rythmes cardiaques spécifiquement liés à ces deux différents types de circuits vagaux, parce que nous avons besoin de les comprendre tous les deux. Nous devons comprendre ce qui cause le changement de ce merveilleux état positif de calme et de détente en enfer.

L’étude ACE (Adverse Childhood Experiences) a montré que les expériences négatives de l’enfance mènent à toutes sortes de problèmes médicaux. Donc les traumatismes inhibent le système de freinage vagal et compromettent la capacité à réguler les affectations et les émotions. Une des manières fondamentales dont nous utilisons la médecine énergétique, les soins énergétiques, la psychologie énergétique, du moins sur le plan émotionnel, c’est quand les gens sont contrariés. Là encore, plus on travaille avec, plus on soigne ce système de frein vagal, plus la personne peut récupérer rapidement et se calmer émotionnellement, ce qui bien sûr mène à toutes sortes de questions de santé.

Stephen W. Porges est un «scientifique universitaire distingué» au Kinsey Institute de l’Indiana University Bloomington et professeur au département de psychiatrie de l’Université de Caroline du Nord à Chapel Hill en Caroline du Nord. Le professeur Porges a dirigé le Brain-Body Center au département de psychiatrie de l’Université de l’Illinois à Chicago, où il a également occupé des postes dans les départements de psychologie, bioingénierie et a travaillé comme adjoint au département de Neurosociences.

Avant de rejoindre le corps professoral de l’Université de l’Illinois à Chicago, M. Porges a été président du département de développement humain et directeur de l’institut pour l’étude des enfants. Il est un ancien président de la Society for Psychophysiological Research et a été président de la Fédération des sciences comportementales, psychologiques et cognitives. Il a été récipiendaire d’un prix du National Institute of Mental Health. Il a présidé l’Institut national de santé infantile et développement humain, le comité de recherche sur la santé maternelle et infantile et a été chercheur invité au Laboratoire d’éthologie comparée de l’Institut national de la santé infantile et du développement humain.

En 1994, il a proposé la théorie polyvagale donnant un aperçu du mécanisme de médiation des symptômes observés dans le cerveau. Cette théorie a stimulé la recherche et les traitements mettant l’accent sur l’importance de l’état physiologique et la régulation du comportement.

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